quelques (gros) mots (doux)
La Belle histoire que voilà, André Hellé, 1926
Le Roman de Renart, ill. Benjamin Rabier
Les
Contes
Le conte a pris naissance dans la tradition orale, il occupe désormais une jolie place dans l’édition jeunesse. Pourquoi les enfants aiment-ils autant ces récits, en apparence si simples ? Peut-être cet aspect merveilleux, surprenant, parfois déroutant. Peut-être ce caractère atemporel, universel, mais toujours si familier… Une histoire dans laquelle on se reconnaît et qui nous fait voyager. Rien de moins que notre patrimoine humain.
Un auteur de conte, c’est une fourmi (même un peu cigale) qui suit la cohorte, la chaîne de transmission, entre écriture et réécriture. Revisiter sans dénaturer, un récit qui s’apprête à revoir le jour, lui qui remonte à la nuit des temps.
Restituer son propos, d’accord, et avec quel plaisir… mais pas sans aller puiser à la source ! Prête à en découdre avec les livres poussiéreux (version 2.0 #gallicabnf), suivre la trace des collecteurs du XIX, pour dénicher ce trésor culturel, ce diamant brut (parce qu’on se prend pour un aventurier, même si on arrive pas à la cheville de Jim Hawkins) qui a donné naissance aux versions futures et aux multiples lectures (oui, le Petit chaperon rouge a été jaune, bleu et même vert)
L’étape de la recherche est inconnue des lecteurs. Et c’est toute la magie du conte. Sa richesse inestimable. Découvrir qu’il a pu prendre sa source dans un passé mythique. Puis, prolonger son écho. À son humble échelle. Car il était une fois et il sera encore.
Les animaux dans l'imaginaire enfantin
Les animaux en littérature jeunesse, quelle histoire ! La plus petite des souris occupe l’espace littéraire à la manière d’un éléphant. Pourquoi un tel détour ? Pourquoi, dans l’imaginaire enfantin, s’identifier à un ours quand un « petit soi » serait une voie plus directe et à hauteur d’enfant ? De la fourmi à la baleine, en passant par l’ours, le renard et le loup… Chacun son trait de caractère, sa représentation, son lot de fantasmes et de fables reconnaissable en un clin d’œil. Sans sous-texte. Ils partagent alors les tempéraments et les sentiments humains. Depuis l’étiquetage, perspicace et pragmatique, du Roman de Renart (avant, encore : le catalogue des fables d'Esope !). Et là où l’on apprend à un enfant à reconnaître les traces laissées par les animaux dans la forêt pour les identifier, on lui apprend à reconnaître, en littérature, les indices laissés par le type du renard rusé, du lion majestueux, du loup féroce (que l’on peut déconstruire à l’envi, si l’on se frotte aux stéréotypes, et passer du modèle à l'anti-modèle, du représentant de la norme humaine à son détracteur.). Les animaux nous ressemblent, juste ce qu’il faut de parenté pour que l’affection qu’on leur porte offre cette étrange proximité de laquelle découle la possible mise à distance. Ésope invoque les animaux car l’animal dit toujours vrai. Sa parole est sans filtre, beaucoup plus limpide que celle de l’homme. Il y a ce sous-entendu en littérature jeunesse, qu’un animal ne ment pas : un enfant adhère spontanément à sa parole (cette idée est notamment développée sous la plume concise de Martine Bourre).
Or, les enfants prêtent souvent des qualités humaines aux animaux. Ils évoluent dans un monde fantastique, ce fil tendu entre rêve et réalité. L’animal, c’est un détour par l’émerveillement. Les petits hommes regardent les animaux d'un oeil anthropomorphe et, par ce biais, le monde animal regarde avec distance le monde des hommes. Quel enfant ne s’est pas un jour demandé ce qui pouvait traverser l’esprit de son animal de compagnie ? Que voit-il... à quoi pense-t-il... que pourrait-il dire s'il était doué de parole? La littérature la lui donne pour décrire la vie des hommes, véhiculer nos propres mots, avec cette distance, cet œil de lynx du chat juché sur le piano de la maison.
Enfant, les histoires de Beatrix Potter m'ont subjuguée, en raison, je pense, de l'infinie douceur de son trait qui n'interdit en rien le mordant de son propos et cet aspect de "merveilleux naturel" qui en découle. La campagne idyllique dans laquelle évolue Pierre Lapin est un rêve éveillé. Mais les animaux sont de "vrais" animaux, ils ressemblent à des lapins, des souris, des hérissons, des rouges-gorges tout en étant vêtus et doués de parole. Ils conservent un mode de vie animal, vivent dans des tanières et des terriers, craignent pour leur vie, chacun conservant sa place dans la chaîne alimentaire : l'histoire de Pierre Lapin s'ouvre sur une mise en garde, son père ayant fini dans un pâté ! Mais ce sont toutes nos émotions d'enfants qu'ils véhiculent pourtant, ces émotions indomptées, avec délicatesse et espièglerie.
Chez Hellé les animaux sont des jouets qui s’animent, Chez Benjamin Rabier ils sont si proches des humains qu’il lui est possible de mettre en œuvre une large palette d’émotions : les animaux sont aussi facétieux que cruels, drôles que cyniques. Rien de mièvre dans le fait d’utiliser les animaux pour libérer la parole… aujourd’hui, nous parlons aux enfants de façon plus ouverte. Les animaux tendent à s’effacer, et avec eux leur rôle d’héraut, aux profits de petits héros de chair et d’os.
Esope et le renard
André Hellé
De Renart en Renard
Renard n’a pas été choisi au hasard. Dans son œil malicieux, une trace du rusé goupil demeure (si rusé et tellement goupil que Renart est devenu « renard »). Mais il n’est ni roublard, ni sûr de lui, ni charmeur, dans cette histoire. Oui, sous la plume d’Olivier, il garde son panache. Pour le reste...
... Dans le bestiaire des Compagnons, le renard, " libre et joyeux ", désigne celui qui a effectué une partie de son apprentissage avec le compagnonnage, puis qui a préféré poursuivre son propre chemin. Il se tient en retrait de la bande, tout en restant lié aux autres. Il ne partage pas toutes les convictions, mais le même goût du savoir, dont il aime multiplier les sources. Il n’est pas (complètement) solitaire, d'ailleurs il fédère. Il continue d’apprendre et de transmettre, bien qu’il trace sa route. Comme Renard, il cherche sa propre voie.
Au second plan Ella ?
Avant de devenir « The First Lady of Song », la jeune Ella Fitzgerald avait, dit-on, un rêve… celui d’être danseuse (une histoire, vraie ou pas, mais qui suffit à dessiner le mythe de la Grande Dame du Jazz). Craignant de se ridiculiser lors d’un concours de danse, elle a le réflexe de chanter ! Aux côtés d’Armstrong, elle popularisera une nouvelle façon de chanter : le scat.
Ou comment exprimer spontanément, par des onomatopées improvisées, ce que dicte son cœur…
S’il est au premier plan notre beau renard, il le doit à Ella. Dans Swing Renard, c’est d’elle que vient l’impulsion, la toute première pulsation, le soubresaut du cœur que Renard n’entend pas. Qu’est-ce qui fait tourner le monde, si ce n’est l’amour ! C’est souvent ce qui nous pousse à devenir. Sans elle, pas de désir, ni de déclic. (Ce pourrait être l'amitié, cette histoire d'amour était un prétexte mais l'exégèse de mes petits lecteurs m'a fait prendre conscience de sa jolie place dans cette histoire de renards...). Ella incarne aussi le rêve à atteindre, l'inclination, puisqu’elle même ne restera pas une danseuse de second plan, mais une chanteuse qui occupera toute la scène. Peu importe qu'il y ait du public, pourvu qu'on occupe sa scène intime, celle qui nous tient lieu de vie ?
Le scat, c’est le cœur de l’histoire de Swing Renard. Avec le scat, il n’y a pas de propos pourvu d’un « sens littéral » mais le pur jaillissement de la voix, qui permet d’exprimer ce que l’on porte en soi spontanément. Être authentique, parler avec son cœur, sans avoir besoin de « s’inventer une musique », c’est ce que Renard apprend.
It don't mean a thing
Renard aimerait inventer un petit air pour Ella, celle qui fait battre son cœur et la mesure.
Comment ?
Pour faire entendre sa voix, il va devoir trouver la sienne...
"It don't mean a thing, if it ain't got that SWING
It don't mean a thing, all you got to do is SING"
Version Louis Armstrong
Version Ella Fitzgerald
Now, here's a very entrancing phrase,
It will put you in a daze,
To me it don't mean a thing,
But it's got a very peculiar swing!
Zaz-zuh-zaz-zuh-zaz,
Zaz-zuh-zaz-zuh-zay !
Zaz Zuh Zaz - Cab Calloway, 1933
Le swing désigne d'abord une façon de danser, de « se balancer » sur la musique, avant de faire référence au rythme essentiel du jazz et au courant musical des années trente. Celui des grands orchestres, les big band, de Benny Goodman, The King of Swing, Lionel Hampton ou Duke Ellington. Les chanteuses Ella Fitzgerald, « The First Lady of Swing » puis « The First Lady of Song », Peggy Lee, Ivie Anderson. Louis Armstrong popularise une nouvelle façon de chanter : le scat. À travers lequel s’illustre Cab Calloway, auteur de la chanson Zaz zuh zaz.
Ils vécurent enfants
et firent beaucoup d'heureux
« Un conte, c’est d’abord ce qu’il raconte, des aventures, des personnages, des épisodes, des scènes, des détails, c’est cela qui assure sa permanence, incitant à des reprises, écrites et orales, où le souvenir qu’il laisse se maintient dans une version nouvelle de ce qu’il raconte, des aventures, des personnages, des scènes, des détails. » Jean-Paul Sermain, La face cachée du conte.
Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
– Si, je la vois venir, avec ses gros sabots, la morale…
Ah la morale de l’histoire, la vérité générale, le modèle, la leçon de bien vivre, l’exemple à suivre : la délicate affaire ! Et pourtant, lorsqu’on se frotte à l’exercice du conte, elle est là, entre nos mains et, que doit-on en faire, mince, sous nos doigts ? Puisque la morale justifierait à elle seule le genre… cette morale détournée de la fiction… mais alors, l’histoire, l’imaginaire, le merveilleux ?
Pour aborder cette épineuse question, il me faut invoquer le vert des épines de conifère. Et un conte étiologique : Pourquoi les conifères sont-ils toujours verts ? (même en hiver)
Ce conte scandinave au message contemporain, porté par la palette vert-espoir de Crescence Bouvarel, me tient particulièrement à cœur.
Un conte pour parler des injustices de notre époque ou évoquer le changement climatique : oui, pourquoi pas. Le conte peut apporter davantage à celle ou celui qui le lit (ou l’écrit…) que cette idée de morale, à laquelle on peut préférer celle d’un message qui pourrait tout aussi bien, d’ailleurs, être multiple. C’est que le conte est d’une malléabilité avantageuse ! Il se prête à bien des lectures. Et ces lectures seront toujours fragmentaires. Or, avec ces multiples lectures, comment le conte pourrait-il donner un sens unique au récit ?
Par ses messages, et non plus sa morale, le conte ouvre des réflexions bien plus larges. S’il souhaite encore aider à « bien » vivre (où plus humblement poser la question des conditions de ce bien vivre…), c’est moins par l’idée d’une conduite à suivre que par la petite lumière avec laquelle il tente d’éclairer les comportements humains. Le lecteur se met alors à suivre le cheminement tissé par le récit sur son cadre de pensées.
D’ailleurs, les lectures d’un même conte évoluent à travers les époques. Tandis qu’un même conte rencontre différentes lectures à travers le monde. Jean Mainil parle de
« l’éternelle richesse du conte, en France mais aussi dans le monde, et de l’invincible vivacité de l’imagination et du merveilleux, quel que soit leur langue, ou leur pays ou leur époque. ». Et morale de l’histoire : ça me plait bien.
Le conte étant hybride, un conte étiologique dissimule souvent un conte moral. Doit-il pour autant se contenter d’intégrer au récit une morale diffuse ou lui préférer des pistes de réflexion permettant au discours de se situer par-delà la lecture binaire, et forcément réductrice, que l’on prête au genre ?
Quoi qu’il en soit, dans les contes de Perrault, la morale est bien mise en avant à la fin du récit. Impossible, en somme, de faire comme si on n’avait rien lu ! Mais souvent, y perce l’ironie de l’auteur, qui n’hésite pas à s’en amuser, à faire preuve de second degré, pour dédoubler le point de vue, voire à formuler une deuxième morale qui vient contredire la première… Perrault va jusqu’à proposer une double fin au Petit Poucet, histoire de le rendre bien moins exemplaire et nettement plus futé. Dans la Belle au bois dormant, il refuse tout bonnement de faire la morale à ses lecteurs. Il juge la première bien trop convenue. Mieux : il avoue ne pas du tout croire à ce qu’il raconte ! À cette histoire de mariage, « en fin de conte », lorsque se présente le prince charmant au chevet de la princesse endormie, qui après l’avoir attendu près de cent ans, s’éveille enfin (le baiser n’est présent que chez les Frères Grimm). Dans une seconde morale, Perrault réajuste la scène : ce peut-il que la princesse ait réellement attendu tout ce temps ?
Quel piètre moralisateur qui rit de la bienséance ! Mais que faire de la morale à l’épreuve de la réalité… De là à dire que Perrault possède un œil féministe (et l’autre misogyne ?) : nulle envie de m’aventurer sur ce terrain. Mais l’œil critique, même s’il est de toute évidence nécessaire, peut s’avérer parfois tout aussi manichéen que la critique même adressée à la morale : se contenter de se situer entre le bien et le mal réduit le conte à peau de chagrin et à un bien triste dessein. Enfin, Perrault souligne bien la pluralité des sens possibles, par cette double morale. La morale y est moins "détournée de la fiction", comme le veut la formule, qu'en parfait décalage avec le récit...
Reste que, dans les contes, le mal est toujours puni et le bien, récompensé. Il s’agit de faire triompher le faible sur le puissant. Mais encore. De faire entendre une voix d’enfant aussi, dans le Petit Poucet, par exemple, face à l’amour parental défaillant… Le conte ne porte-il pas en lui une interrogation sur le rapport de l’enfance au monde ? À travers la structure binaire du conte, l’enfant découvre un monde nuancé. Ce paradoxe en fait l’une de ses plus belles richesses à mon sens.
Les enfants se sont reconnus dans un genre qui ne leur était pas destiné du temps où les contes étaient purement oraux. Le premier genre pourtant qui parle d’eux, de leurs situations dans l’univers des adultes, de cette enfance parfois malmenée mais toujours optimiste. Une enfance sans espoir n’aurait aucun sens. Le petit héros ou la petite héroïne, pour grandir, y apprend à « gouverner » son royaume, et à se faire respecter, dans un monde où le merveilleux peine à déguiser entièrement le réel.
Le discours des contes ne semble donc pas aussi total et figé que cette idée de morale, aujourd’hui désuète. Mais ce « bon sens », qui peut prêter à caution chez les auteurs d’un autre temps ou les réécritures trop édulcorées, ne peut remettre totalement en question ce que le conte contient de sens (ou même tout simplement, de rêve). Le message nourrit la réflexion. Or, cette réflexion peut parfaitement réévaluer le message !
À chaque conte, j’essaie, dans le cadre qui m’est confié, de me hisser à hauteur de ce souhait. Et ce n’est pas chose aisée.
Au fond, les enfants n'écoutent ni ne lisent les contes pour savoir ce qu’il est bon ou mauvais de faire. J’ai demandé à mon fils ce qu’il pensait du conte scandinave. Sa lecture : « dans la vraie vie, il y a des chênes qui auraient accepté de recueillir la petite mésange. Ce n’est pas parce que c’est un chêne qu’il rejette l’oiseau mais parce que c’est celui de l’histoire, même s'il représente plusieurs personnes qui agissent comme ça. Le saule hésite, il finit par faire comme ce chêne, mais un jour, j'en suis sûr, un autre saule pourrait très bien dire oui à la petite mésange, comme le conifère ! » Les bons et les méchants ? Si ça, c’est pas de l’espoir… Vive les forêts mixtes !
Dans son discours d’acceptation du prix Nobel de littéraire, le conteur Isaac Bashevis Singer explique qu’il y a 500 raisons d’écrire pour les enfants. Pour gagner du temps, il en confie dix. La dixième raison dit ceci :
« Ils n’attendent pas de leur auteur chéri qu’il sauve l’humanité.
Aussi jeunes qu’ils soient, ils savent que ce n’est pas en son pouvoir.
Seuls les adultes ont de telles illusions enfantines. »
Pourquoi ?
Pourquoi les conifères sont-ils toujours verts ?
Le vert c’est la couleur que je préfère, le vert bleuté du ciel d’hiver, le vert moussu du sous-bois… toutes les nuances de Crescence Bouvarel, c’est aussi le bleu et le jaune de la mésange, mais encore l’espoir qui colore l’iris de mes enfants.
Cet oeil vert, c'est également celui, attentif, de mon papa ornithologue. Ce conte scandinave lui est dédié.
Son admiration pour les oiseaux, qu’il connait sur le bout des ailes, remplit sa vie. Il n’a de cesse de s’envoler vers d’autres pays pour simplement les observer et les écouter. Alors, il se transforme en arbre, et il attend, immobile. Je soupçonne certains volatiles de venir se nicher dans sa barbe blanche. Il est comme le roi Hiver : géant barbu, carrure carrée et œil acier. Le regard doux. Cette passion agrandit le monde qui l’entoure et le nôtre avec. Elle a sans aucun doute nourri la manière dont il a élevé sa propre nichée. Dans le respect de la nature et de ses habitants. Il était une fois un pinson, minuscule dans la paume immense de mon père, le minuscule cœur affolé qui soulevait la minuscule poitrine. Surpris en plein vol par une vitre reflétant, sans doute, les arbres de sa forêt qu’il espérait rejoindre. Ce petit oiseau transi dans cette grande main chaleureuse, forme l’une de ces images-souvenirs sur lesquelles le temps qui façonne les adultes ne peut rien.
L’histoire de ce jeune oiseau migrateur en quête de l’arbre qui lui tendra sa branche me touche particulièrement. Le conte, universel et si familier, a la capacité de nous parler, quels que soient notre époque et notre monde.
Moderniser ce conte, ce n’était pas le tordre et l’essorer pour qu’il corresponde à notre époque, c’était puiser ce qui y fait écho. Parfois tristement écho. Mais une enfance sans espoir n’a aucun sens. De cette enfance, avec ce papa-là, j’ai conservé une plume, et avec elle, j’écris. Peut-être que je n’écris pas seulement pour les enfants mais depuis l’enfance.
Merci papa, pour la plume.
Dans les forêts de Scandinavie, les arbres sont hauts et fiers. L’été, ils sont peuplés d’oiseaux. Fuyant le souffle du vent d’hiver, ils finissent par s’envoler vers des terres plus chaleureuses. La migration. Une jeune mésange, l’aile brisée, doit renoncer au voyage et trouver refuge : elle demande asile aux arbres. Mais, ni le chêne (qui craint pour ses glands) ni le bouleau (qui ne veut sacrifier aucune de ses feuilles), ni le saule (qui hésite à ouvrir ses branches à un oiseau étranger) ne sont prêts à lui tendre une branche. La petite mésange pénètre alors dans une clairière où elle découvre des arbres qui ne ressemblent pas aux autres : des conifères. Ils n’ont pas peur d’elle, ils ne la rejettent pas, mieux, ils l’aident. Et, ensemble, ils se tiennent prêts à affronter le souffle du vent, sous l’œil protecteur du roi Hiver.
Écrire depuis l'enfance
« Ti-Michou et Gros-Cachou » : tout premier souvenir de lecture… dans mon esprit devenu une bulle composée d’images plus vastes qu’elles-mêmes. Le rendez-vous de Pomme d’api. Et mon tout premier souvenir d’elle. Lovée dans ses bras, emmitouflée dans sa chaleur, enivrée de son parfum - qui s’appelait « Poême » -, bercée par sa voix qui murmure. Qui s’est déposée au creux de ma petite oreille tous les soirs de ma petite enfance, avant de disparaître, à l’aube de celle-ci. Ma mémoire a perdu sa voix ; sa chaleur et son parfum se sont évaporés. Et j’ai grandi. Pourtant, il me semble que j’écris toujours depuis ce petit lit, où, serrées l’une contre l’autre, nous n’étions plus qu’une histoire. Le temps d’une soirée. Un temps infini. L’infini de l’enfance.
Où je la garde éternelle.
La reine des abeilles
Un petit bzzzijou méconnu des frères Grimm adapté et modernisé pour la reine du Père Castor, Bénédicte Roux. Les illustrations aux couleurs de miel et au charme suranné de Katerina Bazantova Boudriot sont un ravissement pour les yeux.
Les abeilles mellifères sont apparues en même temps que les fleurs, il y a près de cent millions d’années ! Que serait le printemps sans parfum et bourdonnement ? Dans leur bel habit jaune et noir, elles sont si précieuses nos butineuses…
Merci aux apiculteurs.trices qui protègent et récoltent pour nous l’or jaune des abeilles, ces « petits insectes capables de fabriquer du ciel » dans la jolie langue de Pef.
"On ne sait quel enchantement avait changé en pierre les habitants du château, les empêchant d’agir. Peut-être, comme les grands princes, avaient-ils méprisé la vie et négligé le rôle de la plus petite des fourmis ? Mais, soyez-en sûr, la reine des abeilles les sortit de leur torpeur, remerciant ainsi le jeune prince qui l’avait défendue."
It don't mean a thing
Renard aimerait inventer un petit air pour Ella, celle qui fait battre son cœur et la mesure.
Comment ?
Pour faire entendre sa voix, il va devoir trouver la sienne...
"It don't mean a thing, if it ain't got that SWING
It don't mean a thing, all you got to do is SING"
Version Louis Armstrong
Version Ella Fitzgerald
Now, here's a very entrancing phrase,
It will put you in a daze,
To me it don't mean a thing,
But it's got a very peculiar swing!
Zaz-zuh-zaz-zuh-zaz,
Zaz-zuh-zaz-zuh-zay !
Zaz Zuh Zaz - Cab Calloway, 1933
Le swing désigne d'abord une façon de danser, de « se balancer » sur la musique, avant de faire référence au rythme essentiel du jazz et au courant musical des années trente. Celui des grands orchestres, les big band, de Benny Goodman, The King of Swing, Lionel Hampton ou Duke Ellington. Les chanteuses Ella Fitzgerald, « The First Lady of Swing » puis « The First Lady of Song », Peggy Lee, Ivie Anderson. Louis Armstrong popularise une nouvelle façon de chanter : le scat. À travers lequel s’illustre Cab Calloway, auteur de la chanson Zaz zuh zaz.